Les Tabatières Chinoises en Verre Overlay

Les Tabatières Chinoises en Verre Overlay

Les Tabatières Chinoises

en Verre Overlay

 

Parmi les objets les plus fascinants de la dynastie Qing, les tabatières chinoises en verre overlay — ou snuff bottles en verre doublé — incarnent une synthèse rare entre innovation technique, raffinement esthétique et culture lettrée. Si leur usage s’est imposé avec l’introduction du tabac à priser au XVIIe siècle, c’est au XVIIIe siècle, sous les règnes de Kangxi puis de Qianlong, que ces petits flacons atteignent leur apogée artistique. Fabriquées dans les ateliers impériaux de Pékin ou dans les centres verriers renommés comme Yangzhou ou Boshan, elles illustrent l’ambition de condenser l’univers impérial dans quelques centimètres de verre gravé.

Flacon tabatière

Flacon Tabatière vers 1850

Le principe du verre overlay, ou verre doublé, repose sur une technique complexe. Une première couche de verre — translucide, opalescente, blanche, rose ou jaune — est soufflée dans une forme précise. Une ou plusieurs couches de verre coloré sont ensuite appliquées à chaud sur cette base. Une fois la pièce refroidie, l’artisan procède à la gravure de la couche supérieure, révélant le décor en creux. Chaque motif ainsi dégagé laisse apparaître la couleur de fond. C’est cette alchimie de couches superposées, de taille à froid et de maîtrise des volumes qui confère aux tabatières overlay leur profondeur visuelle unique. Certaines pièces présentent un fond neigeux (xue di boli), un verre blanc constellé de fines bulles, évoquant une brume diffuse ou laiteuse — très prisé pour la douceur qu’il confère aux décors. D’autres, tout aussi raffinés, présentent un fond transparent, bleu pâle, turquoise ou même violet clair, jouant sur la lumière interne et les effets de contraste.


Ces flacons étaient bien plus que de simples contenants. Ils étaient offerts à la cour, échangés entre lettrés ou commandés comme gages de faveur. La forme du flacon — ronde, plate, en poire ou hexagonale — n’est jamais laissée au hasard. Elle dialogue avec le motif, souvent gravé en réserve : dragons impériaux, chauves-souris, fleurs de lotus, pivoines, paysages lettrés, ou caractères auspicieux tels que 福 (bonheur), 壽 (longévité), 喜 (joie). Ces images, loin d’être décoratives, formaient un langage codé où chaque détail avait sa raison d’être.


La gravure du verre overlay, extrêmement technique, exigeait une précision parfaite. La couche colorée devait être suffisamment épaisse pour permettre une taille profonde, mais sans percer la base. Dans certains cas, l’artisan multipliait les couches — jusqu’à trois — pour créer des effets de superposition et de perspective. Le résultat final dépendait autant du souffleur que du graveur, et les meilleurs flacons témoignent d’une parfaite symbiose entre forme, décor et matière.


Les tabatières à fond neigeux, bien qu’exceptionnelles, ne sont donc qu’une des expressions d’une diversité plus large. C’est cette richesse de variation — du verre limpide au fond laiteux, du rouge rubis au vert céladon, de la gravure fine à la sculpture en fort relief — qui fait aujourd’hui des tabatières en verre overlay des objets hautement collectionnés. Elles figurent dans toutes les grandes collections : au Palace Museum de Pékin, au British Museum et au Victoria and Albert Museum de Londres, au Metropolitan Museum de New York ou au Musée Cernuschi à Paris. Certaines pièces, signées ou attribuées à des maîtres verriers impériaux, atteignent des sommets en vente publique, notamment celles associées aux règnes de Qianlong et de Jiaqing.


Collectionner ces flacons, c’est entrer dans un monde de miniatures impériales où le verre devient langage. Chaque pièce raconte une histoire silencieuse — celle d’un empire qui se pense en symboles, d’un artisanat poussé à son sommet, et d’un regard chinois porté sur le monde à travers la transparence. Notre galerie propose une sélection rigoureuse de tabatières chinoises en verre overlay, à fond neigeux ou translucide, chacune accompagnée d’une notice complète et d’une provenance soignée. Elles sont visibles à la galerie ou en ligne, dans un espace dédié à l’art impérial de la miniature.


Références et bibliographie sélective

– Bob C. Stevens, The Collector’s Book of Snuff Bottles, Weatherhill, 1976

– Lilla S. Perry, Chinese Snuff Bottles: The Adventures and Studies of a Collector, Tuttle, 1960

– Hugh Moss, Victor Graham, Ka Bo Tsang, A Treasury of Chinese Snuff Bottles, Hong Kong, 1993

– Clare Chu (dir.), Chinese Snuff Bottles from the Collection of Mary and George Bloch, 2000–2010

 

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